Coincés entre sionistes et islamistes, les chrétiens arabes de Palestine voient année après année leurs chances de survie au Proche Orient se réduire comme une peau de chagrin. Les palestiniens chrétiens ne représentent plus aujourd’hui que 3 à 4% de la population totale de la Palestine, et dans la bande de Gaza ne forment plus qu’un îlot de 1500 à 3000 habitants immergé au milieu d’un million et demi de musulmans. Majoritaires à Bethléem et à Nazareth avant 1948, les chrétiens sont devenus minoritaires. Ce phénomène de lente érosion qui par ailleurs touche toutes les communautés chrétiennes d’Orient, s’est trouvé amplifié en Palestine ces dernières années en raison de l’émergence sur la scène politique de mouvements religieux qui, comme le Hamas ou le Hezbollah, sesont imposés comme les nouveaux porte étendards de la lutte pour la libérationde la Palestine. Cette nouvelle donne est le résultat de la perte de crédibilité du Fatah auprès de la population palestinienne.La corruption de son appareil politique, sa mauvaise administration des territoires placés sous son autorité, associées à l’idée qu’ils ne verront peut-être jamais se réaliser le rêve d’un état correspondant à leurs aspirations en tant que peuple, ont finit par pousser les palestiniens dans les bras de ceux qui se sont présentéscomme les meilleurs défenseurs de leur cause. Le comportement services secrets des israéliens n’étant faut-il le préciser pas tout à fait étranger à la mise sur orbite des islamistes à la place des laïcs autour de cette question. Les résultats des élections législatives de janvier 2006 dans les territoires palestiniens confirmeront la montée en puissance des islamistes du Hamas, en leur donnant 74 sièges au Conseil Législatif Palestinien contre 45 au Fatah. Prix entre l’étoile de David et le Croissant, les 13 chefs d’églises de Jérusalem après ce succès remporté par le Hamas, préféreront faire profil basen considérant que ce succès était en grande partie imputable à la situation désespérée des gazaouis.
Bien qu’ayant été victimes des mêmes injustices après avoir été chassés, dans les mêmes conditions, de leurs terres ancestrales, puis combattu pour la même cause et vécus dans les mêmes camps de réfugiés, les chrétiens de Palestine n’en n’ont pas moins commencé à penser que le compte à rebours de leur présence en Palestine avait démarré. Les déclarations incantatoires du Sheikh Abu Saqer, le chef spirituel du mouvement religieux Jihadia Salafiya, proche du Hamas, qui s’est donné pour objectif l’islamisation des Territoire palestiniens, ont du résonner comme un avertissement aux oreilles des chrétiens. « Le drapeau vert de l’Islam flottera sur le Vatican et le monde entier » C’était en juin 2006,en réaction aux propos de Benoît XVI qui citant les paroles de l’Empereur Byzantin Paléologue II avait dit « Montrez moi seulement ce que Mahomet a apporté de nouveau, et alors vous ne découvrirez que des choses inhumaines, comme de répandre la foi par le glaive ».
En juin 2007, le même Cheikh, probablement encouragé par le coup de force réussi par le Hamas sur Gaza au dépend du Fatah, dans une interview exclusive confiée au journal en ligne World Net Daily, décrivait ce que devrait devenir Gaza dans le futur : « la situation a changé aujourd’hui à 180 degrés à Gaza…J’attends de nos voisins chrétiens qu’ils comprennent que le nouveau pouvoir du Hamas implique de réels changements. Ils doivent être prêts à se soumettre au gouvernement islamique s’ils veulent vivre en paix à Gaza… Lajihadia Salafiya et d’autres mouvements islamiques s’assureront que les écoles et les institutions chrétiennes rendent public ce qu’elles enseignent, pour quel’on soit sûr qu’elles ne se livrent pas à une activité missionnaire. Plus d’alcool dans les rues. Il faut que toutes les femmes, y compris les non musulmanes comprennent qu’elles doivent être couverte à tout moment en public…les activités des cybercafés, des salles, des piscines et des bars doivent cesser. Si cela continue, nous les attaqueront très durement».(1).
La marche en avant vers l’avènement d’un Hamasland débarrassé de sa composante chrétienne, semble belle et bien enclenchée. Dés le mois de juin 2006, toujoursdans le but de marginaliser les chrétiens, un conseiller municipal de Bethléem, Hasan El-Masalmeh, par ailleurs leader local du Hamas, suggère de soumettre les non musulmans à l’impôt réservé par le Coran aux dhimis, la Jezya. Dans cette atmosphère générale de christianophobie les actes de violences contre les non musulmans sont devenus récurrents. La société biblique de Gaza en février 2006 est l’objet d’un attentat à la bombe. Au mois de septembre 2006, les propos tenus par le Pape Benoît XVI déchaînent une vague d’actes de violences contre plusieurs églises. La seule librairie chrétienne de Gaza est incendiée en avril 2007 et son propriétaire Rami Khader Ayyad menacé de mort.
Le 6 octobre de la même année, après avoir été kidnappé, son corps sera retrouvé avec des traces de torture, une balle logée dans la tête. En juin 2007, deux institutions chrétiennes sont incendiées et pillées, l’école des Sœurs du Rosaire et l’Eglise Latine. Le 15 février 2008, la Société Biblique de Gaza est à nouveau attaquée à l’explosif et le 16 mai 2008, c’est au tour d’une école chrétienne de subir le même sort. Les jeunes filles chrétiennes portent désormais le voile et même parfois la burka pour passer inaperçues aux yeux des islamistes, notamment les membres du« Comité de la promotion de la vertu et de la prévention du vice »qui entendent appliquer les préceptes des « Moutawas » saoudiens(gardiens religieux des bonnes mœurs de l’Islam) à Gaza.
Au moment où les bombes pleuvent sur Gaza, le Père Artemios qui s’est récemment confié au quotidien « Chrétienté Info », a parfaitement résumé l’obsession qui taraudait en ce moment ses paroissiens, et qui tient en un seul mot : « fuir ». Soulignant la difficulté pour un chrétien de choisir entre le Fatah et le Hamas, tout en étant otage de l’offensive israélienne en cours, le prêtre a fait remarquer aussi que « Pour les israéliens, il importe peu que les gens de Gaza soient musulmans ou chrétiens. Pour eux, tous sont palestiniens ».(2)
Source : Michel Dantan
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