dimanche 8 février 2009

Une dictature qui dit de plus en plus son nom !

Par Fausto Giudice,

Le 12 août 2008, Richard Labévière, écrivain et journaliste de réputation internationale, a été licencié de Radio France Internationale, dans des conditions de brutalité inouïe, qui témoignent des nouvelles méthodes de gestion sous la présidence de Nicolas Sarkozy et du triomphe néo-conservateur de l’équipe atlantiste gravitant dans la sphère directoriale du pôle audiovisuel extérieur français sous la houlette de Christine Ockrent, épouse du ministre transfuge des Affaires étrangères français.

Ce licenciement avait été anticipé par une préparation psychologique sous-traitée par la SDJ (la Société des jounalistes) qui s’étonnait déjà, bien avant la convocation du journaliste présumé fautif des conditions de réalisation de l’objet du délit : l’interview du président Bachar al Assad, en prélude à sa visite en France. La raison invoquée pour ce licenciement sec est en effet tout bonnement surréaliste : Richard Labévière est accusé de ne pas avoir informé la direction de la radio de l’interview du président syrien Bachar El Assad qu’il avait réalisée à Damas et qui a été diffusée le 9 juillet par TV5 et le 10 Juillet par RFI, à la veille de la venue officielle d’El Assad à Paris, sur invitation du président Sarkozy.

Richard Labévière n’est pas un vulgaire Siné*. Il a été successivement rédacteur en chef de RFI - poste dont il a été dégommé de fait pour avoir apporté son soutien à Alain Ménargues**, lui-même contraint à la démission pour « antisémitisme » sur demande de l’ambassadeur d’Israël en France, Nissim Zvili - puis responsable de l’émission matinale « Propose ? », qui lui a été retirée en 2005, sur demande du même ambassadeur. Il ne lui restait plus que l’émission « Géopolitique, le débat », 40 minutes le samedi. Il ne l’a plus.

Bernard Kouchner doit rencontrer Bachar El Assad mardi à Damas. On est curieux de savoir comment il expliquera le licenciement de Labévière. Évoquera-t-il le dernier livre publié par le journaliste en collaboration avec le philosophe Bruno Jeanmart, Bernard-Henri Lévy ou la règle du Je***, une charge en règle contre le satrape médiatique BHL ? Ou bien expliquera-t-il à son hôte syrien qu’ « on » ne supportait plus d’entendre Labévière dire que la capitale d’Israël était Tel Aviv et non pas Jérusalem ? Et comment Kouchner expliquera-t-il ce licenciement incroyable à Madame Anne Gazeau-Secret, son ambassadrice à La Haye, aux Pays-Bas, et par ailleurs épouse de Richard Labévière ?

Et quand donc les médias français se résoudront-ils à rendre publique l’information sur ce licenciement ? À l’heure où j’écris, quatre jours après ce licenciement, aucun d’entre eux n’a soufflé mot de l’affaire. L’unique information parue dans le monde l’a été dans des médias arabes : Assafir et Al Manar à Beyrouth, Al Quds Al Arabi à Londres et un site web d’Alep en Syrie. Bizarre ? Vous avez dit bizarre ? En conclusion, je ne peux donc qu’encourager les lecteurs désirant être informés en temps réel sur les faits et méfaits de la France sarkozyenne à s’atteler à la tâche d’apprendre l’arabe. Pour ceux qui n’ont pas attendu mes recommandations pour le faire, je leur conseille de lire l’excellent article de Mohamed Balut, correspondant à Paris du quotidien beyrouthin Assafir Pour ceux qui ignorent encore cette langue, voici un résumé rapide de l’article :

« À la suite de son interview d’El Assad Licenciement d’un journaliste français sympathisant de la cause arabe Le fait d’avoir parlé au président Bachir El Assad a pu coûter au journaliste français, au-delà de l’amertume, son poste à RFI et à TV5 ;Les médias officiels français ne paraissent pas être au courant qu’il y a un rapprochement franco-syrien, ou alors ils cherchent à l’ignorer. Richard Labévière a commis des dizaines d’articles soutenant la cause palestinienne et 2 livres l’an dernier, dont l’un avec Pierre Péan, « Bethléhem en Palestine » (l’auteur fait une erreur, ce livre date de 1999, FG). À la suite de cette publication, il a trouvé sur son bureau une lettre disant « On va t’écorcher la peau ». La question se pose après son licenciement : est-il possible de critiquer Israël dans les médias français ? Nous rappelons toutefois que Labévière a affronté dans son livre « La règle du je », le philosophe juif BHL, lequel, dans une série d’articles dans sa revue « La règle du jeu » criminalisait toute personne critiquant israël. Alain Ménargues avait déjà payé le prix, Pascal Boniface, le chercheur français connu, a été isolé par une violente campagne de presse lorsqu’il a publié son livre avec le titre-phare « Est-il permis de critiquer Israël ? »S’agit-il d’une coïncidence que ce soit la même équipe constituée de Pierre Ganz, responsable des émissions en français de RFI, Frank Weil-Rabaud et Nicolas Vespucci, qui avait mené campagne contre Ménargues, qui a pris l’initiative de mener campagne contre Labévière. Et qui a manifesté son soutien à Richard Labévière ? Uniquement la CFDT... »

Notes

* Dessinateur satirique et anarchiste licencié pour « antisémitisme » de l’hebdomadaire Charlie-Hebdo par son chef néocon Philippe Val pour avoir écrit que Jean Sarkozy, le fils de Nicolas, s’apprêtait à se convertir au judaïsme en prévision de son mariage avec l’héritière des magasins Darty.

**Auteur de deux livres que les autorités israéliennes et leurs partisans français ne lui ont pas pardonné : Les Secrets de la guerre du Liban : Du coup d’état de Béchir Gémayel aux massacres des camps palestiniens et Le Mur de Sharon.

*** Allusion au titre de la revue dirigée par Bernard Henri-Lévy, La Règle du jeu

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